Les arbres, bienfaiteurs de notre Terre-Mère

Sylvie Mireault, naturopathe-herboriste

Dernièrement avait lieu la COP 15 (Conference of the Parties), soit la 15e Convention des Nations Unies sur la biodiversité. Cette Conférence internationale, tenue à Montréal du 7 au 19 décembre 2022, avait pour but d’apporter des solutions et de s’engager dans des actions concrètes pour freiner la dramatique perte de biodiversité. Déjà, à cause de la pollution, des changements climatiques et de l’invasion d’espèces étrangères, environ 1 million d’espèces font face à l’extinction…

Il faut se rappeler que les arbres abritent la biodiversité, et particulièrement les pollinisateurs, dont dépendent 35% de la production agricole mondiale. Environ 1300 milliards d’arbres poussent dans les régions tropicales et subtropicales, 740 milliards dans les régions boréales, 660 milliards dans les régions tempérées et 300 milliards dans les prairies, toundra, déserts… Ces quelques 3000 milliards d’arbres nous protègent de la pollution de l’air et du réchauffement de la planète. Leur ombrage et leur évapotranspiration refroidissent la température moyenne de notre Terre-Mère d’un très précieux demi-degré. En produisant de l’oxygène, les arbres sont d’excellents épurateurs de polluants ; de plus ils filtrent 75% de l’eau potable mondiale et atténuent les impacts néfastes des tempêtes et des inondations. Cependant, l’absorption du carbone par les arbres est sensiblement diminuée par les émissions dues à la déforestation, spécialement dans les zones tropicales, et par d’autres perturbations des écosystèmes forestiers…

Les sommets des arbres filtrent les rayons ultraviolets ; leurs racines freinent l’érosion des sols et le stabilisent, tout en fournissant les nutriments nécessaires à leur survie. La pérennité de l’humanité dépend de cette capacité des arbres à fixer et à modifier le sol, grâce à leurs racines et à leurs feuilles. Notre alimentation dépend presqu’entièrement des sols. Or, dans les climats tempérés, cela prend environ 10 siècles pour produire 3 centimètres de leur couche superficielle ou arable, dans laquelle se développe les végétaux… Malheureusement, le labourage du sol par de lourdes machines, l’épandage de produits chimiques et la déforestation entraînent son érosion rapide, dégradant à l’échelle mondiale cette strate essentielle pour la biodiversité et notre sécurité alimentaire…

En plus de fournir des environnements d’une grande beauté indispensable à notre santé mentale, les arbres nous procurent des molécules médicamenteuses, comme par exemple, le taxol provenant de l’If du Pacifique, à partir duquel un nouveau médicament de chimiothérapie a été créé. L’écorce du Saule blanc, antalgique, fébrifuge, est une bonne source d’acide salicylique, d’où on tire l’aspirine. C’est à partir du Quinquina jaune, mais surtout du Quinquina de Ledger, que l’on extrait la quinine pour soigner le paludisme, et la quinidine, un médicament pour prévenir l’arythmie cardiaque.

De nombreux arbres nous soignent naturellement à travers le monde. Par exemple : le Marronnier d’Inde traite l’insuffisance veineuse, le Bouleau blanc est indiqué dans les états inflammatoires des voies urinaires, la feuille d’Olivier s’avère efficace contre l’hypertension artérielle modérée, la feuille de Noyer s’utilise dans les cas de diarrhée et de déséquilibre de la flore intestinale, le Pin sylvestre contre la toux, les rhumes et les refroidissements. Tant qu’au Quinquina rouge, la décoction de son écorce s’emploie en herboristerie, comme anti-infectieux pour traiter les affections grippales. (Il est à noter que le Quinquina gris ne sert qu’à confectionner des liqueurs.) Il est regrettable que plusieurs arbres et arbustes médicinaux semblent en voie de disparition, tels que l’Orme rouge, le Sureau noir, le Tilleul européen…

La déforestation supprime 15 milliards d’arbres chaque année dans le monde. Par exemple, en Amazonie brésilienne, elle a bondi de 150% en décembre dernier, par rapport au même mois en 2021. Cette destruction de la plus grande forêt tropicale du monde est le fait d’exploitants agricoles qui veulent accroître anarchiquement les cultures et l’élevage, toujours encouragés par le président sortant. Espérons que le nouveau président Lula pourra relancer les programmes de protection et de suivi de l’environnement.

Les arbres sont les poumons de la Terre

Selon les écologues, il ne s’agit cependant pas de planter n’importe quels arbres, n’importe comment, mais bien de replanter des forêts diversifiées et résistantes aux conditions climatiques futures.        

Arborer les villes s’avère une tâche délicate pouvant devenir coûteuse et inefficace.  C’est le cas par exemple de la Turquie, qui a planté 11 millions d’arbres en novembre 2019, pour retrouver 90% de ces sapins et pins mort de soif 3 mois plus tard. Pour atteindre les objectifs climatiques, il importe de restaurer les forêts, en parallèle avec d’autres écosystèmes comme les tourbières ou les prairies. Selon le botaniste Francis Hallé, pour ne pas exacerber le réchauffement climatique, nous devons planter les bonnes espèces d’arbres et compter sur un travail de terrain, de laboratoire et de pédagogie en tenant compte de la spécificité des arbres et en choisissant de nouvelles espèces bien adaptées.

La présence massive d’arbres dans nos villes joue un rôle fondamental pour réduire les pics de chaleur et améliorer la qualité de l’air, et par le fait même, celui de notre santé globale… Selon l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm) : 40% des cas de démences pourraient être évités ou retardés en agissant sur des facteurs modifiables, au sein desquels figure la pollution de l’air.

La Ville de Beloeil a planté 200 arbres pour revitaliser une rue commerciale, en utilisant la technologie Silva Cell pour permettre à ces arbres de se déployer pleinement en milieu urbain. (Lisez l’encadré pour en connaître un peu plus sur cette technologie bénéfique.)

Un panneau explicatif @ Belœil

La santé des forêts assure aussi notre santé. Par exemple, la bactérie Borrelia burgdorferi, portée par les tiques et responsable de la maladie de Lyme, est réduite de 95% dans les forêts abritant les populations hôtes (rongeurs, écureuils), lorsque celles-ci sont régulées par des prédateurs (loups, lynx). On constate aussi combien l’émergence de maladies comme l’Ébola, le Sida et le Coronavirus augmentent avec la dégradation des écosystèmes forestiers, ce qui accroît les contacts dangereux entre les humains et certains animaux. Ainsi, rappelons-nous toujours que la préservation de la biodiversité et de la chaîne alimentaire en forêt protège notre santé…

En terminant, citons le grand poète indien Rabindranath Tagore (1861-1941) qui disait :

« Celui qui plante des arbres en étant conscient qu’il ne profitera jamais de leur ombre a au moins compris le sens de la vie. »

@ L’Académie HerbHoliste 2023